La palabre traditionnelle punu: de la tradition à la modernité

La palabre traditionnelle punu: de la tradition à la modernité

 








1.La palabre traditionnelle punu: de la tradition à la modernité

 La palabre traditionnelle est une pratique qui consiste à réunir les membres d’une communauté dans le but d’échanger, et donc de communiquer,suivant des procédures éthiquement bien définies aux fins de rétablir un ordre momentanément perturbé. Elle est une manifestation culturelle qui fait appel à l’usage de la parole en tant qu’objet esthétique.Elle est aussi une mise en scène codifiéequi obéit à un mode de représentation dont la compréhension n’est possible qu’à travers le système social qui la produit; elle est «la réduction d’un conflit par le langage, la violence prise humainement dans la discussion du verbe, un dialogue s’achevant par la communion»(B. Atangana, 1964, p.461).La palabre se caractérise par la production d’un discours global qui s’organise à travers trois grandes phases. Il y a d’abord la phase introductive qui se traduit par un discours bref et concis, une formule rituelle énoncée par un acteur dont le statut est déterminé par la coutume ou dont la légitimité relève de l’identité sociale. Au cours de cette étape les phrases ci-après sont prononcées: «Bigulumambwématudjilimba(que ceux qui écoutent les problèmes prêtent attention) / na kodu na kodubunzombwé(silence de tous les côtés»; l’assistance répond en chœur «limba/ yékè». Celles-ci signifient «à votre attention s’il vous plaît» et ont pour rôle de solliciter et capter l’attention de l’auditoire qui répond «oui/silence». Dans une sorte de simulacre, dans le cas du mariage, les parents de la jeune fille feignent d’ignorer ceux du prétendant. Dans le deuxième cas, c’est-à-dire celui de la palabreautour des rites funéraires, ce sont les parents maternels qui font semblant d’ignorer le but dela rencontre. Des questions telles que «fikefikenane vo dimbudiaminanediambu yi», «puelbatunanyanguvavediambu yisont posées.Ces paroles qui traduisent l’étonnement et qui signifient«pourquoi il y a autant de monde aujourd’hui ici» marquent le début de la palabre.Bien plus, elles invitent l’échange, la communication quant à la présence inhabituelle de tant des présences.Ensuite, qu’ils’agisse de la palabre de mort ou de mariage, il y a le débat qui se caractérise d’une part,parun réquisitoire accablant et un plaidoyer solide d’autre part. Le principe dans cette phase consiste pour les uns à attaquer, et pour les autres à contre-attaquer. La discussion très vive, repose sur l’opposition Plaignant / accusé, toi/moi, vous / nous et s’articule autour d’un rapport de force qui amène chaque partie à défendre sa position grâce à un argumentaire cohérent nourri de proverbes, de jeux de mots, des techniques oratoires qui font la richesse du verbe chez les punu. Dans le cadre d’une palabre de mort, l’oncle maternel (ou son représentant) du disparu affronte verbalement le père du défunt à qui il demande d’élucider les causes de la mort de leur fils. Lorsque la personne disparue est une femme mariée,c’est-à-dire celle dont les parents ont reçu matériellement la dot, la responsabilité de donner les causes de la mort incombe au mari de cette dernière.Également, à l’inverse la femme mariée sera tenue de donner les raisons du décès de son époux. S’agissant du mariage traditionnel, un porte-parole du prétendant (son père, le neveu du père ou un représentant) se retrouve face à celui de la future épouse (voir le cas du prétendant). L’objectif visé au cours de cette étape estla recherche objective d’une résolution du Numéro : 2 b, décembre 2017http://www.regalish.net10problème posé. Enfin, le dénouement est la dernière phase, celle des décisions finales.Le débat est alors une quête vers un dénouement favorable pour tous, un compromis ou un consensus après une grande négociation qui, elle, procède du respect du « code des usages ». En réalité, la production littéraire orale punus’inscrit avant tout dans la tradition; dans ce cadre, la place des acteurs, les actions, les lieux sont connus et assumés. Il existe des critères de sélection (âge, sexe, statut social) qui fixent le rôle de chaque membre dans l’organisation de la palabre. La catégorie sociale qui a le pouvoir et la direction de celle-ci est constituée du père, de l’oncle maternel, du médiateur (en cas de blocage). Le public est un acteur incontournable de la palabre car il est formé d’une communauté des corps qui constituent l’auditoire. Toutefois, il joue à la fois le rôle de récepteur et d’émetteur,dans la mesure où il est souvent interpellé par les acteurs principaux qu’il peut approuver, désapprouver et même censurer quand c’est nécessaire. Comme l’affirme P.Ngandu Nkashama (1993, p.247), le public est donc un «auditoire susceptible de rentabiliser la parole, le discours de la palabre, la conscience sociale immédiate». En effet, tout propos n’est valable que lorsqu’il a reçu la caution du groupe.
Contribution:  Ginette Flore MATSANGA MACKOSSOT,

GABON MARIAGE COUTUMIER PUNU GUY ROGER & LESLIE




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