En effet, si les frontières peuvent être communes, comme c´est le cas pour la géographie, la politique des nations, ou des faits historiques, elles sont finalement uniques pour chaque exilé, chaque migrant, et chacun qui accepte la voie précaire de la recherche de soi. Ceci est notamment visible, paradoxalement, dans les écrits du mouvement de la négritude, où la figure de l´autre est représentée comme implacable. Ce fameux courant a été mis en œuvre, comme nous le savons, par Césaire, Senghor et Damas à partir des années 30, c´est à dire à un moment critique de la période coloniale. Il avait pour but la libération par le biais d´un ancrage dans « l´être noir », cette communauté d´ individus qui partagent un rapport à un lieu, l´Afrique et, pour beaucoup d´entre eux, un rapport à une histoire dans laquelle, entre autres traumas, « a eu lieu », comme on dit, le « Middle Passage » dans lequel ont été jeté des millions de personnes esclavisées reste une plaie ouverte.Dans cette veine on pense bien sûr à des textes d´une force indéniable comme « Paysages II » du poète gabonais Pierre-Edgar Moundjegou-Magangue. Ce poème, d´une simplicité et d´un abord apparemment immédiats, est rendu beaucoup plus riche et complexe, au-delà de ses échos baudelairiens, par le fait qu´il est profondément ancré dans la prosopopée. Voici comment le poème se termine:
Je porte désormais toutes les voix des reclus
L´opprimé est mon double
Le combattant est mon frère
L´exilé est mon semblable
Tous mes frères de lutte et d´espoir
Tous mes frères de pensée et de cœur Azaniens
Sarahouis, Palestiniens, Namibiens
Immense troupeau des peuplesd´errance
Parqués dans les multiples
résolutions de l´O.N.U. (Moundjegou-Magangue 1987: 50)
Source:Salah J. Khan Universidad Autónoma de Madrid.
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