Dénominations, importance et hiérarchisation de la parole chez les Punu
La parole occupe une place primordiale dans la société et peut être considérée comme inhérente à celle-ci, elle est bien au-dessus d’un simple ‘’acte naturel’’ tel que le fait de marcher.
C’est une fonction non instinctive, acquise, une fonction de culture. Si l’individu parle, communique son expérience, ses idées, ses émotions, il doit cette faculté au fait qu’il est né dans une société.
En premier lieu c’est le vocable «mbémbù» qui est utilisé. Cette expression renvoie à la fois à la notion de « langue » dans le sens d' « ensemble de signes spécifiques aux membres d’une communauté servant de moyen de communication »On ne peut donc pas dissocier ces deux réalités que sont parole et société
-Le fait de parler chez les Punu se dit « Uvòs ». Dans cette communauté, la parole revêt plusieurs formes d’expression. Plusieurs termes désignent la parole et en même temps de« voix » considérée comme « l’ensemble des ondes sonores produites dans le larynx par la vibration des cordes vocales sous la pression de l’air sub-glottique. Ce terme renvoie aussi à la notion de parole entendue comme « la faculté de s’exprimer dans un langage articulé et une chose dite par quelqu’un à laquelle on accorde une valeur ».
-Le terme « mbémbù» que le révérend Père Joseph Bonneau« munu » : au sens premier, il désigne la bouche (organe). Il peut être aussi employé pour désigner les paroles qui sortent de la bouche des locuteurs. Ainsi, il est synonyme de la ‘’version’’ utilise pour désigner la parole dans son lexique Punu- Français, puis Français-Punu. En dehors de la notion générique de «mbembu », il en existe d’autres qui lui sont proches et qui prennent le sens de « parole » selon le contexte d’utilisation.
- Ce sont entre autres les expressions suivantes :
* « igumà » : ce terme renvoie à une parole profonde, celle qui touche. On a ici l’idée d’un argument incontestable et qui fait autorité. Lorsqu’un ancien prend la parole au cours d’une cérémonie, si celle- ci vient trancher des avis controversés ou apaiser des tensions, on dira par exemple « ah ça c’est la parole : a ́ yineIguma».,
d’un récit. Cela montre l’association entre la parole et la personne humaine, la parole étant considérée comme une production mettant en scène plusieurs organes du corps humain. C’est à ce titre que les Punu considèrent que la meilleure parole « mûlə̀ » ou la bénédiction doit venir du cœur « mùrím ».
* « dilongu » : on utilise constamment ce vocable pour désigner le dialecte régionalparlé par les individus, nous l’assimilons au terme parole par rapprochement à «mbembu » qui renvoie à la langue. J. Dubois et alli (1994 :143) définissent que : Par opposition à la langue, le dialecte est un système de signes et de règles combinatoires de même origine qu’un autre système considéré comme la langue, mais n’ayant pas acquis le statut culturel et social de cette langue indépendamment de laquelle il s’est développé,
C’est donc tout naturellement que les locuteurs du yipunu emploient ce terme pour évoquer la notion de parole. Une parole qui a valeur d’avis, d’indications données à quelqu’un pour le guider. En somme, c’est une recommandation, un conseil.
langue et l’adjectif «lɛng» qui signifie léger. Quant à «yipunu i batme » cette expression signifie littéralement ‘’langue serrée ‘’ Les « paroles légères » désignent toutes les paroles ordinaires et sont comprises par tout le monde. Quant aux « paroles serrées », elles renvoient à tout discours échappant à l’homme ordinaire ou non initié. Les ‘’paroles légères’’ relèvent de l’usage quotidien. Nul besoin de voiler ou de codifier, le langage est accessible à tous.
Les ‘’paroles serrées’’, par contre, font appel à une rhétorique, un niveau de langue parfois archaïque que seuls les initiés ou les cercles restreints peuvent comprendre.En fait, indépendamment de cette distinction et à l’observation, les « paroles légères » peuvent servir les « paroles serrées ». La devise par exemple, est portée par une « parole légère» dont tout le sens est à rechercher dans la « parole serrée », c’est le cas aussi pour le conte. Ce sont ces paroles serrées que l’on retrouve dans les énoncés tels que les proverbes qui sont des énoncés fortement poétisés et imagés, d’un niveau d’élaboration et de raffinement élevé. Ces « paroles serées » sont l’apanage des «nzontsi » et des «ivovis », des maîtres de la parole chez les Punu. Ces derniers manient la parole avec dextérité et détiennent la magie du verbe comme les griots d’Afrique de l’ouest. En effet, « Ils ne délivrent leurs messages qu’à travers un discours porté par des termes d’un niveau très élevé d’élaboration et de raffinement ».
Les «nzontsis »et «ivovis »ont un statut particulier dans la communauté. Ils bénéficient du respect et de l’admiration des autres membres de la communauté. Leur mission, est de veiller à transmission du patrimoine culturel et de maintenir l’harmonie et la cohésion du groupe. Ils jouent le rôle de juge coutumier et interviennent dans le règlement des conflits qui naissent dans la société.
Source: Amevi Christine Cerena Tomba Diogo
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Jun 19, 2019
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Litterature punu
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