Jan 31, 2021

LA VIE AGRICOLE

La vie agricole est partagée entre deux saisons: la saison sèche et la saison des pluies.
1. La saison sèche
Vers les mois de mai/juin, les hommes ou les femmes commencent à choisir les lieux des prochains champs. Pour effectuer ce choix, ils débroussaillent bitsaku, petites parcelles qui délimitent le champ. Au cours du mois de juin, les hommes, les femmes et enfants s'en vont camper en forêt. TIsaménagent milaku, lieux de camping. La durée du défrichement et d'abattage des arbres dans les champs est de deux mois environ. Les habitants vont travailler ensemble pour constituer dilande, ensemble des champs choisis par un groupe de villageois. Le travail en commun prend le nom de imbile. Les villageois vont s'entraider en échangeant les jours de travail d'un champ à l'autre. Pour indiquer aux autres la direction des champs, on utilise kolulu (feuilles élaguées sur le sentier).
2. L'abattage des arbres dans les champs
Cette activité est réservée essentiellement aux hommes. Pendant que ceux-ci abattent les grands arbres, les femmes s'activent pour préparer le repas. Celui-ci est composé de boulettes de bananes, tubercules de manioc, etc. accompagnés de délicieuses sauces de noix de palmes yambi-ngatsi. Entre midi et deux heures, lorsque le contenu des marmites respire sur les feuilles de bananiers, une femme ou une jeune fille va prévenir les coupeurs de bois, bawanzi.
Pour éviter tout accident imprévu, elle passe du côté où les haches n'ont pas encore livré leur combat avec le gros mulombe, mugane, etc., arbres des forêts secondaires et primaires. Pour signaler sa présence, elle dit: -"jo, jo, jo ", et les bûcherons répondent: -" Jo, yové", dans. un chœur alterné et rythmé par le bondissement des derniers coups de haches sur les arbres. Les derniers arbres en cours d'abattage tombent eux aussi dans un cri de chœur: "ko[wa", et en un mouvement appelé diyingu. A la fin de ce "tombage", les bûcherons crient pour signaler que le danger est passé, et que tout se passe bien. Certains en lancent des cris d'encouragements, konu, et d'autres fredonnent des mélodies en guise de prières de remerciements. La femme ou jeune fille qui s'était mise à l'abri derrière des troncs d'arbres interpelle une seconde fois les abatteurs : - ruganwo : venez! A la suite de cet appel, les hommes laissent leurs haches, se dirigent vers mulaku où ils vont reprendre des forces. Le repas terminé, ils retournent aux champs pour continuer l'abattage en chansons.
-Le rituel des travaux champêtres chez les Punu :
Tout travail manuel est rythmé par des chansons. Pendant que les hommes s'activent aux champs, les femmes se rendent à la rivière avec des calebasses pour y puiser de l'eau. Les enfants qui les accompagnent cherchent des petits crabes, bikèke, sous les cailloux. Ces" crabettes" leur permettront de jouer au bukaji, jeux de famille.
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3. La recherche des boutures
A la fin de la période d'abattage, pendant que le soleil assèche les végétaux et que les rats palmistes rongent les cœurs des palmiers, les jeunes garçons tendent des pièges bidoke, mavange, mabandu, bisuli, pour capturer des oiseaux, des gazelles, entre autres. Les jeunes filles, quant à elles, en compagnie de leur maman, vont chercher des rejetons de bananes, des boutures de manioc, des ignames, et autres plantes dans des paniers en liane, misudu. Ces cultures sont placées sous des branches et feuilles mortes au pied des grands arbres. De temps en temps, les femmes plantent quelques boutures sous le musoli pour tester la fertilité de la terre.
4. La mise à feu des champs
Au mois de septembre, profitant d'une journée ensoleillée, les femmes ou les hommes vont mettre du feu aux champs ainsi défrichés. li est important de faire attention à la direction du vent. Cette précaution d'usage est indispensable pour éviter tout accident pendant l'embrasement. Une personne se tient à la lisière du champ, pànge nungi, et encourage la "brûlée" par le chant suivant: Kangié vole mwèndu Ibonge aké wu dale: le feu, file vite pour que la tortue ne te rattrape pas. Le lendemain matin, les habitants procèdent à la vérification des brûlis. lis observent si la masse des végétaux asséchés a été réduite en cendre tout en ramassant les animaux morts.
5. La mise en terre des boutures
Quelques jours plus tard, les femmes cultivent des boutures à des endroits appropriés du champ. Certaines parcelles sont réservées à la culture des ignames jaunes: notamment celles recouvertes par des cendres rouges-ocres. Les cannes à sucre sont cultivées de préférence au bord des points d'eau. Les grains de maïs sont ensemencés à proximité des souches mortes. Dès les premières pluies ou rosées saisonnières, des bourgeons poussent des boutures mises en terre sous le musoli pendant l'abattage. TI existe une science de l'agriculture chez les Punu. Une cultivatrice plante en se référant au cycle de la lune, à la qualité de la terre, à sa position pendant la mise en terre. Exemple: la culture des ignames. Les ignames sont mis en terre sous des branchages brûlés. La cultivatrice a obligation de s'asseoir à même le sol pour éviter que les jeunes pousses ne deviennent migànge, c'est-à-dire des mauvaises ignames qui terminent leur maturation sous le soleil, avec un bout hors de terre. TIest recommandé de ne pas faire des cultures sous une terre encore chaude.
6. Sarclage et récolte des aliments
Quand les pluies se font abondantes, les plantes et l'herbe de toutes sortes poussent dans le champ. Pour aérer les cultures et favoriser une pousse harmonieuse, les femmes réunissent leurs efforts pour le sarclage des champs: c'est le procédé de imbile. Le travail s'effectue souvent à mains nues ou protégées par des morceaux de chiffons.
Si le chemin qui mène vers le champ est bordé d'herbes rampantes, il leur est conseillé de se nettoyer les pieds avant tout travail de désherbage. Cette précaution est indispensable pour éviter que l'herbe ne détruise les plantes. Dans un mouvement d'ensemble, les femmes avancent en chantant dans un chœur rythmé par le « houalement» des machettes dans l'herbe: isinge sagulé, sagulé... sagulé: sarclons l'herbe. Lorsque le soleil arrive au-dessus de leurs têtes, elles se reposent à l'ombre des grands arbres pour partager leurs mets, inditsini. Les repas sont servis dans des feuilles de bananiers. Les faces maquillées par le charbon, elles mangent en écoutant le son des chants des colibris, toucans, pigeons, etc. Les périodes précédant les récoltes sont parfois marquées par une ruée d'animaux dévastateurs, notamment les éléphants. Pour protéger les cultures de bananiers, les jeunes fabriquent des sonnettes à l'aide des boîtes de conserves ou d'objets bruyants. La récolte se réalise selon les besoins des familles. Chaque samedi, les femmes accompagnées de leurs filles et parfois de leurs petits garçons se rendent aux champs pour remplir les paniers pour la semaine. Les régimes de bananes ainsi récoltés sont parfois destinés à la vente de détail aux commerçants venant des villes voisines ou lointaines. Ceux-ci viennent s'approvisionner en régimes de didungu, bake, biri, qu'ils vont revendre à la capitale (Libreville qui signifie la ville des esclaves libres). Ce moment de marchandage se nomme dikase.

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